Entrevue avec France Beaudoin

15 Déc 2016 par Laurie Dupont
Catégories : Oser être soi
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Immersion dans le monde merveilleux et féerique d’une animatrice vraiment très sympathique.

La prolifique animatrice et productrice fait partie des gens qui ont le cerveau en constante ébullition. Et cette travailleuse acharnée ne s’accorde qu’une seule vraie pause durant l’année: la période du temps des Fêtes. Entrevue réjouissante avec une fan finie de Noël.

«Je suis FOLLE de Noël», lance-t-elle d’entrée de jeu lorsque je lui annonce que c’est justement là-dessus que portera l’entrevue. Il n’en fallait pas plus pour que ses yeux scintillent et que ses mains s’agitent pour illustrer ses propos. Sachez qu’au moment où vous lisez ces lignes, le sapin est déjà bien en place chez les Beaudoin-Graton. Mais pas un «sapin parfait aux couleurs tendance créé par une décoratrice». Ça non. Il n’aurait tout simplement pas sa place au cœur de la maison.
«Chaque année, on concocte la même sauce à spag, on ressort les mêmes boules – qu’on a achetées à Disney, à San Francisco, un peu partout – et on se raconte les mêmes histoires qui nous lient à chacune d’elles. Il est dépareillé, notre arbre, d’autant plus qu’il contient aussi les bricolages que les enfants ont faits au fil des ans et qui, avouons-le, sont parfois laids! Mais on en rit et on l’aime pareil!»

Qu’on se le dise: Noël, c’est du sérieux pour France, et depuis longtemps d’ailleurs. «À 19 ans, dans ma première maison, j’ai gardé mon sapin jusqu’à la deuxième semaine d’avril! Je n’avais pas d’enfants, mais j’étais équipée en stock de Noël comme si j’en avais douze! J’avais même un train qui faisait le tour de la maison! (rires) Je ne sais pas pourquoi j’étais déjà si touchée par ça», s’interroge-t-elle, en retirant du même coup ses chaussures pour s’asseoir confortablement en indien sur le canapé qui fait face au mien.

Enfant, France a maintes fois célébré en grand le jour de l’An avec la famille de sa mère, mais Noël, beaucoup moins. En la questionnant sur la raison de ce clivage entre les deux fêtes, je pouvais envisager une foule de réponses possibles… sauf celle-ci: «Je me souviens qu’on attendait mon père, le soir du réveillon, et que ma mère piaffait d’impatience parce qu’il rentrait tard. À l’époque, on avait une épicerie et j’ai compris bien plus tard que mon père y servait un punch, caché derrière la boucherie. Quand j’ai finalement eu accès au punch, j’ai compris pourquoi il ne rentrait pas à 17 heures!» (rires)

Un moment sacré

Quand la productrice ultraproductive pense à la période des Fêtes, c’est le temps d’arrêt auprès des gens qu’elle aime qui prime. «C’est un moment sacré pour moi. Je ne lis ni mes textos ni mes courriels, car pendant ce temps-là, ça devient comme légitime de ne répondre à personne, de ne pas être au bout de sa laisse.»

Comme France souhaite que ces moments magiques se prolongent, elle ne fait plus aucun aller-retour à travers le Québec entre Noël et le jour de l’An: famille et amis viennent plutôt passer du bon temps à la maison. Mais n’est-ce pas épuisant de recevoir tout ce monde pendant quelques jours, voire quelques semaines? Pas du tout, assure la principale intéressée: «J’ai un principe de base: quand tu entres chez nous, tu dois être autonome. Voilà le frigo, voilà les draps pour faire ton lit. Bienvenue! Si ce n’est pas ça que tu veux, tu n’es juste pas à la bonne place», affirme-t-elle, on ne peut plus zen.

Elle réfléchit quelques secondes avant d’ajouter: «C’est de se sentir responsable de tout le monde qui est lourd. Moi, si je veux aller me coucher, je fais la sieste tout l’après-midi, sans aucune culpabilité. C’est dit et assumé. Je n’ai pas de permission à demander à qui que ce soit.» Avouons que cette philosophie de vie est plus qu’enviable. Et comment Juliette, 12 ans, et Théo, 9 ans, se sentent-ils par rapport à ce mode de fonctionnement? «Les enfants sont vraiment habitués de vivre avec du monde dans la maison. Ici, les gens entrent et sortent. Tout le temps. Ça fait partie de notre ADN.»

Et ce n’est pas peu dire. L’an dernier, France et son conjoint [le comédien Vincent Graton] ont voulu faire une surprise aux enfants en achetant des billets pour aller à Disney World pendant les vacances de Noël… mais les petits ont refusé. «Imagine-toi donc qu’on a dû annuler le voyage! Les enfants ne voulaient pas manquer le temps des Fêtes en famille. C’est trop ancré en eux. On a vraiment créé un monstre avec ça!» lance-t-elle en s’esclaffant.

Comme au bon vieux temps

Si les enfants Beaudoin-Graton n’ont pas voulu quitter leur nid à Noël l’an passé, c’est pour une foule de bonnes raisons. Quand ils étaient plus petits, aucun scénario n’était trop farfelu pour leur créer des souvenirs impérissables. Une fois, France a même tenté d’organiser l’arrivée du père Noël en calèche, mais la municipalité a refusé sa requête à cause des bancs de neige qui rendaient le chemin trop étroit.

En fait, la seule concession à laquelle France s’objecte, c’est au sujet des cadeaux. «Je travaille assez fort dans la vie, il y a une maudite limite à ce que le père Noël prenne tout le crédit des cadeaux! (rires) Même quand ils étaient plus petits, c’était important pour moi que mes enfants sachent que j’avais entendu leurs demandes! Le père Noël pouvait donc apporter des babioles, un petit mot… et de la magie. C’est tout.»

Cela dit, un beau jour, France a bien dû divulguer la vérité à sa progéniture. «Chaque fois qu’on a annoncé à un de nos enfants que le père Noël n’existait pas, on s’est mis à brailler… et eux aussi. On leur disait qu’ils faisaient maintenant partie du Grand Secret… mais au fond, on essayait juste de leur dorer la pilule! (rires)

Pour perpétuer la tradition, c’est maintenant au tour de Juliette et de Théo de jouer, d’une façon très touchante, au père Noël. «Ce n’est pas parce que je veux me donner bonne conscience, mais notre famille participe chaque année à Opération Père Noël, confie l’animatrice avec une certaine fierté dans la voix. Ma fille et mon garçon reçoivent chacun une lettre d’un enfant défavorisé dans laquelle ce jeune exprime ce qu’il souhaite recevoir à Noël. Ensemble, on va alors acheter les cadeaux, on les emballe et on leur écrit un mot. Ça n’a rien de pathétique, on le fait plutôt pour la notion de partage. Et même si ce n’est pas compté comme tel, mes enfants savent qu’ils reçoivent, en quelque sorte, un cadeau de moins.»

Avec ou sans père Noël, rien n’égale la magie du 24 décembre dans le cœur de France. Le soir du réveillon, pas moins de 80 personnes se réunissent chaque année chez les Beaudoin-Graton. «On fait une grande patinoire sur le lac. Les enfants enfilent leur habit de neige par-dessus leur pyjama et vont glisser de la galerie jusqu’au lac. Ça, c’est Noël! Il n’y a aucune bébelle qui arrive à surpasser ça. Quand je les vois lâcher leurs jeux vidéo pour jouer tous ensemble, je trouve ça magique!»

Le sourire aux lèvres, elle enchaîne avec conviction: «Il n’y a pas d’heure de dodo, pas de règlement, ni de “T’as mangé trop de sucre”… parce que si un de mes enfants en mange trop, il sera malade et va s’en souvenir toute sa vie! (rires) On prend juste le temps d’être bien.»
Pour quiconque a connu des conflits répétés chaque année au temps des Fêtes, il est difficile de croire que ce genre de situation déplorable n’existe pas dans certains clans. C’est pourtant le cas au sein de la famille de France: «Du côté de ma mère, dit-elle, il n’y a jamais de chicane. Les gens sont accueillants et ouverts aux autres. Je n’ai jamais entendu de remarques comme “Untel va être là, donc l’autre ne viendra pas”. On est simplement contents de se voir et reconnaissants que ça se fasse encore, sans forcer qui que ce soit. Parce que personne n’est obligé d’être présent. Et tu n’as pas à m’informer que tu ne viendras pas, tu n’as pas à t’excuser ni à me dire pourquoi. C’est comme ça, chez nous!»

10, 9, 8, 7, 6…

5, 4, 3, 2, 1… BONNE ANNÉE! Autant notre animatrice chouchou de 47 ans affectionne ce moment du grand décompte, autant elle l’appréhende toujours un peu. «À minuit, il ne faut pas que je regarde trop les gens que j’aime dans les yeux, surtout pas ma mère! (rires) J’ai bien de la difficulté avec ça. Je leur souhaite une bonne année, mais je ne les serre pas trop dans mes bras non plus.» Sensible, cette chère France? «Plus je vieillis, plus je suis consciente qu’on est chanceux d’être encore tous là… et je ne veux surtout pas qu’il en manque un l’année suivante! On sait tous qu’il faut profiter de la vie maintenant, car n’importe quoi peut arriver. C’est une super théorie, que j’apprends encore à mettre en pratique.»

Photo: Andréanne Gauthier

Cette entrevue est parue dans le Magazine VÉRO de Noël 2016.

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