Amateur ou amatrice de golf? Si la réponse est non, ne fermez pas le magazine dans la seconde, l’analogie sera courte. Le neuf de retour marque la mi-parcours d’une ronde de golf qui compte 18 trous. Les neuf premiers trous sont joués et les neuf derniers nous attendent après un sandwich et un Gatorade. Le neuf de retour – ou le back nine – représente la marche vers l’aboutissement ou la finalité de quelque chose, selon qu’on voit le verre à moitié plein ou à moitié vide. Fin de la portion RDS.
Cette analogie symbolise pas mal mon état d’esprit post-pandémique. Une crise qui nous a vite rappelé que tout peut basculer très rapidement et que notre contrôle sur les choses les plus importantes, comme la santé, est limité et même parfois nul.
J’ai 48 ans. J’ai travaillé activement plus ou moins l’équivalent de 25 ans. Sans vouloir être trop déprimant, je peux affirmer que j’ai vécu plus de 50 % de mon existence et que je suis à mi-parcours de ma vie professionnelle, qui ralentira progressivement. Ce constat ne me réjouit pas du tout. Il ne me plonge pas non plus dans un état dépressif ou de profonde anxiété, mais il m’effraie et m’angoisse quand même.
Et comment Louis réagit-il lorsqu’il sent que les choses (incluant le temps) lui filent entre les doigts? En essayant de reprendre le contrôle, autant que faire se peut. Je ne suis pas du genre à vivre dans le déni, sans planification. Concrètement, la première étape est de s’autoanalyser et de tirer des conclusions. Comme le fait que je ne veux pas vivre mes 20 prochaines années comme les 20 dernières (que j’ai pourtant ADORÉES). C’étaient des années excitantes, mais je ne suis plus là dans ma tête. Je suis essoufflé. J’ai construit ma carrière, j’ai jeté les bases d’une vie qui me rend heureux et qui a rempli mon égo. Je me sens maintenant rendu à une étape où je n’ai plus à prouver ma valeur à qui que ce soit. Je continuerai de relever de grands défis, de tenter de me dépasser, mais pas avec le désir de plaire ou d’impressionner les autres. Je veux ME dépasser, je veux tester MES limites et garder l’artiste en moi en mode recherche. L’homme d’affaires, lui, doit cependant faire place à la relève et aux dauphins qui ont faim.
Et il y a ma femme. Je veux passer plus de temps avec ma femme et ma meilleure amie. Heureusement, c’est la même personne; ça facilite le voyagement. Je veux vieillir avec celle que j’aime et profiter du jardin que nous avons cultivé pendant des années.
Et il y a les enfants. La page couverture du magazine peut en témoigner, ils grandissent à la vitesse grand V. Dépendant de mon état mental ou de fatigue, j’ai des comportements complètement paradoxaux avec eux. Une partie de moi aurait envie de les garder avec nous 100 % du temps. Particulièrement quand ils arrivent à l’âge adulte et que les conversations s’ouvrent sur plein d’enjeux fondamentaux. J’aurais envie de faire le tour du monde avec eux, de partager avec eux ce que j’ai appris de la vie, de profiter de chaque instant avant que mon corps me lâche.
À l’opposé, je sais que le meilleur cadeau à leur offrir est une fenêtre vers l’autonomie. Il y a une limite à ce que tu peux enseigner aux enfants. Ils doivent le vivre. Ils doivent tomber, se relever, faire des erreurs et accomplir de grandes choses… sans papa et maman. C’est pourquoi Delphine est en appartement et que Justin ira lui aussi vivre dans ses propres quartiers. Est-ce trop tôt? J’imagine que la réponse varie d’une famille à l’autre. Dans notre cas, je veux les voir se développer et trouver leurs réponses sans être dans l’ombre de parents qui prennent beaucoup de place. J’ai l’impression que de les garder dans notre giron serait une façon de me faire plaisir à moi, au détriment de leur émancipation. Peut-être que le métier qui a habité notre maison chaque jour de leur enfance nous réunira dans un environnement professionnel. Mais entre l’enfance et la carrière, il y a ce passage où ils doivent trouver leurs propres réponses.
Et ça me laissera du temps avec ma vieille. Et avec notre petite (!) Raphie. Ici, c’est le moment où Delphine et Justin diront: «C’est ça, tu vas passer du temps avec ta chouchou!» Ce n’est pas ma chouchou, mais j’ai effectivement une tendresse particulière pour ce qu’elle représente. Chaque étape qu’elle franchit, comme la fin de son primaire, signifie que moi aussi j’avance dans mon neuf de retour. Et qu’inévitablement, je marche vers le clubhouse. Il me reste à rendre cette marche le plus paisible et enrichissante possible.
À lire aussi :
- Le Magazine VÉRO des Fêtes est arrivé en kiosque!
- Nos plus beaux guides cadeaux pour Noël
- L’édito de Véro : Le mythe du Grinch