Hilarant, attachant, baveux, impertinent… Ça, c’est l’Antoine Bertrand qu’on connaît. Mais sous ces dehors d’amuseur public se cache un homme pudique au coeur de caramel. On a tenté d’entraîner la bête hors des sentiers battus pour y découvrir sa vraie nature.
Il y a toujours, avant une entrevue, un léger stress. Comme pendant les secondes qui précèdent une blind date. D’où surgira Antoine Bertrand? Quelles seront les premières paroles échangées? Je suis prise de court lorsque mon téléphone sonne. Plantée à l’entrée du
Jardin botanique de Montréal, je décroche et j’entends: «Oui, allô, c’est Antoine, ça va? T’es où là? Grouille pas, j’arrive.» Je ne grouille pas. Et quand, une minute plus tard, je l’aperçois qui avance tranquillement sous les érables, je lui souris. Il se penche, m’embrasse sur les deux joues, et je lui emboîte le pas dans l’allée baignée par la lumière de juin. C’est cliché, mais on dirait que nous nous connaissons déjà.
«Je ne suis jamais venu ici.» Moi non plus. Je sais cependant qu’Antoine est un gars «de bois». Né à Granby, «mais pas dans la ville, au fin fond du rang, tu sais», il a en lui ce besoin profond de nature. C’est pour ça que j’ai voulu attirer le comédien à l’ombre de grands arbres, le sortir du cadre classique de l’entrevue dans un café – le genre de chose qu’il fera à la tonne pendant la promotion de Louis Cyr: l’homme le plus fort du monde.
Antoine Bertrand : une force plus ou moins tranquille
Le long métrage n’est pas encore à l’affiche au moment de notre rencontre. Quels seront les échos? Le film sera-t-il un succès? Tout est encore incertain. Lira-t-on dans les journaux que Louis Cyr, 100 ans après sa mort, fracasse encore des records… mais de box-office, cette fois? Je ne sais pas. Antoine non plus.
Nous nous assoyons sur un banc et, le plus posément du monde, il dit: «Si on a bien fait notre job, les gens vont venir voir le film. Sinon, ils ne viendront pas. Moi, je suis vraiment fier de ce que j’ai fait. Je n’aurais pas pu donner plus. À chaque scène, à chaque prise, j’ai joué ce que j’avais à jouer.» En prononçant ces mots, il me lance un regard entendu au-dessus de ses lunettes de soleil, l’air de dire: «On se racontera pas d’histoire, et puis, ça ne sert à rien de spéculer.» Bien, d’accord. N’empêche que Louis Cyr, c’est huit ans de sa vie. Huit ans à attendre, pour diverses raisons, d’avoir le O. K. pour le premier tour de manivelle. Huit ans à mener sa carrière d’acteur et d’animateur, à multiplier les expériences professionnelles, à se forger le corps et l’esprit à l’image de l’homme fort.
Photo : Jocelyn Michel
La suite de l’entrevue en page 2.