Kim Richardson : Jusqu’au bout de sa voix

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19 Avr 2023 par Élise Jetté
Catégories : Culture / MSN / Oser être soi / Véro-Article
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Le talent nous charme toujours davantage quand il s’exprime sans prétention aucune. C’est le cas de Kim Richardson, dont la voix nous impressionne depuis plus de 40 ans.

Choriste et chanteuse émérite, elle a récemment gagné les rares coeurs qui ne l’avaient pas encore adoptée durant la première saison de l’émission Zénith, à ICI Radio-Canada Télé. Cette artiste née à Toronto s’est installée à Montréal comme on choisit une amie… et le Québec l’a choisie en retour.

Ma conversation avec Kim Richardson aurait pu durer toute la journée. Dès qu’on entend son premier rire, on se sent en présence d’un membre de la famille, de quelqu’un qui nous aime déjà. On veut y rester. J’avoue que, d’emblée, je l’ai abordée avec des éloges, d’ailleurs bien mérités par ses nombreux exploits. Sa carrière de choriste lui a donné des ailes qui l’ont menée jusqu’aux plus grandes vedettes de notre époque. Et même si elle a chanté en compagnie de Stevie Wonder, de Céline Dion, de Barry White et de Ginette Reno, elle discute avec tout un chacun en restant humble… comme une débutante. 

Née pour chanter

Fille unique, Kim a grandi à Toronto avec toute sa famille dans un grand appartement où la musique faisait vibrer les murs. Elle-même devenue maman à 18 ans, elle quitte la maisonnée pour venir à Montréal, cinq ans après la naissance de sa fille, dans le but de projeter sa voix un peu plus loin. «La musique, c’est mon don et j’avais besoin de le partager», dit Kim en parlant de ce déménagement comme d’un immense saut dans le vide. «Ma famille me disait : “C’est-tu sérieux, ton métier ?” et j’ai toujours répondu: “Je suis née pour faire ça.” Tous les day jobs me déprimaient. Je ne voulais pas travailler dans un resto, je voulais chanter. »

Aprés avoir été chanteuse dans des groupes à son école secondaire, elle décide d’amorcer sa carrière «à la dure», dans les bars. «J’avais 14 ans quand j’ai décroché ma première gig dans un bar, dit-elle. Je savais déjà que l’université, c’était pas pour moi. Je voulais apprendre le métier en le vivant.»

Elle n’avait que 17 ans quand elle a chanté devant Stevie Wonder pour la première fois. Assise dans un bar – alors qu’elle n’avait pas l’âge d’y être admise –, son ami lui a donné un petit coup de pied sous la table en voyant le grand artiste s’installer à leurs côtés avec son entourage. «Il y avait une scène pour un open mic et mon ami m’a demandé de chanter quelque chose pour Stevie. J’ai finalement décidé d’y aller. Surprise ! Stevie Wonder s’est levé et il est venu sur la scène chanter Master Blaster avec moi. J’en étais tellement honorée ! Le jam a duré 20 minutes. C’est la plus longue version de Master Blaster qui n’a jamais été chantée, je pense», dit Kim en éclatant de rire. Et bien qu’elle avait déjà des billets pour le concert de la star américaine le lendemain, Stevie lui a offert des places au troisième rang, en plein centre de la salle. «Le show a duré quatre heures, sans entracte. À l’époque, on avait le droit de faire ça !»

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De Toronto à Montréal

Déçue par les petits cachets et le manque d’opportunités dans la capitale ontarienne, Kim croit profondément à la bonne étoile qui l’a conduite à Montréal. «Dès que je suis arrivée sur le plateau de Beau et chaud, j’ai réalisé que je pouvais gagner ma vie avec ce métier-là. C’est d’abord grâce à Normand Brathwaite que j’ai pu me bâtir une carrière au Québec.» Tout s’enchaîne pour elle à la suite de ses apparitions à la télé et dans des publicités en 1988. Kim s’esclaffe d’ailleurs quand je lui mentionne qu’il s’agit de mon année de naissance. «Ça doit être pour ça que les choses ont commencé à mieux aller», plaisante-t-elle.

Les plus grandes forces de la chanteuse ? Sa ténacité et sa passion pour son métier. «C’est une chose que j’ai apprise très jeune: si je peux faire ce que j’aime dans la vie, tous les jours seront joyeux ! Je voulais simplement payer mes factures avec ce qui me rendait heureuse.» Des contrats pour des entreprises, des back vocals et n’importe quel type de chant, quelle que soit la langue… Kim a tout fait ! «Si on me demandait de chanter en italien, je prenais une journée pour décortiquer l’accent et je le faisais ! Je ne comprenais rien, j’apprenais les chansons phonétiquement.»

Complètement abasourdie à l’idée que certains puissent vouloir vivre au Québec sans apprendre le français, elle s’est familiarisée avec la langue de Molière dès son arrivée à Montréal. Encore aujourd’hui, Kim est persuadée que plusieurs portes se sont ouvertes devant elle grâce à cet apprentissage : «Je suis allée à l’émission Les démons du midi, puis à plusieurs autres. Au début des années 1990, passer à la télévision était primordial pour qu’une carrière puisse prendre son envol. J’étais alors une femme célibataire, mère d’une petite fille. Pour moi, la priorité, c’était de travailler pour pouvoir vivre de ma musique. J’ai tout fait avec cette idée-là en tête.» 

Au début des années 1990, passer à la télévision était primordial pour qu’une carrière puisse prendre son envol. J’étais alors une femme célibataire, mère d’une petite fille. Pour moi, la priorité, c’était de travailler pour pouvoir vivre de ma musique. J’ai tout fait avec cette idée-là en tête. 

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Journée d’Amérique

Lorsque je lui parle de Bruno Pelletier, Kim réagit aussitôt : «Je n’étais pas sa choriste. J’étais une chanteuse à ses côtés.» Sa tournée de près de quatre ans avec lui fait d’ailleurs partie des moments qu’elle chérit le plus dans son parcours. Elle perçoit la main qu’il lui a tendue comme une chance professionnelle immense, mais elle retient surtout la gentillesse de l’homme. «Quand je passe à la télé, il me texte toujours. C’est vraiment un bon gars.»

Cela dit, la toute première tournée de Kim au Québec, c’était Journée d’Amérique, auprès de Richard Séguin, en 1988. «À l’époque, ce n’était pas facile de travailler avec moi parce que je ne parlais pas encore un mot de français, se remémore-t-elle. J’ai eu la grande chance que le bassiste Kevin de Souza – qui parlait anglais et français – fasse partie du band. Durant cette tournée, je me suis blessée et je ne pouvais plus bouger. Un gars a cogné à ma porte avec sa table de massage sous le bras. Il s’est installé dans mon salon et il m’a dit qu’il venait de la part de Richard Séguin.»

Si les contacts professionnels ont été cruciaux pour ses débuts dans le métier, c’est néanmoins la voie du cœur que Kim emprunte pour raconter chacune de ses expériences musicales. Par exemple, cette anecdote liée à son premier appartement à Montréal. «À ce moment-là, je n’avais vraiment rien, aucun meuble. Richard Séguin est arrivé avec la van de tournée. Il avait acheté tous les meubles qu’il me fallait et il avait engagé un gars pour tout transporter. Il m’a donné tout ça ! » Et quand elle chante Ensemble avec lui, tant aujourd’hui qu’à la fin des années 1980, elle affirme: «Je peux le regarder sincèrement dans les yeux et remercier Dieu pour cette amitié. Ses chansons m’ont toujours touchée, même avant que je comprenne le français. Et ça aurait pu être de très mauvais textes, je n’en n’avais aucune idée », dit Kim en rigolant.

Bref, toutes ces rencontres ont forgé son histoire qu’elle ne peut raconter autrement qu’en soulignant la bonté de tous ceux qui l’ont entourée. À Toronto, Kim a appris à aimer chanter sur scène, mais elle s’est vite lassée des carcans dans lesquels on catégorise facilement les artistes. «On dirait qu’à Toronto, je ne pouvais me produire que dans les clubs funk ou R&B. À Montréal, en revanche, j’ai tout fait, dit-elle. Du country avec Bobby Hachey, du jazz avec The Merlin Factor… Je n’avais pas d’occasions du genre à Toronto. »

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Jusqu’à la fin

Les chapeaux de soliste et de choriste occupent une place égale dans le cœur de Kim. Aucun des deux ne prime sur l’autre. «Les choristes soutiennent l’artiste en vedette, mais doivent aussi se fondre avec les instruments, explique-t-elle. On ne peut pas avoir quatre choristes dont l’une chante plus fort que les autres. Comme soliste, par contre, tu dois driver le show. Mais ultimement, les deux ont la même importance.» Et comme elle adore travailler tant sur les projets des autres que sur les siens, Kim estime primordial de se fier à son instinct afin de s’assurer qu’elle est toujours au bon endroit, au bon moment.

Cela dit, au cours des prochaines années, la chanteuse souhaite prioriser ses projets d’album et de spectacle solo. Elle ne s’en cache pas: son rêve de jeunesse était de devenir soliste, et même s’il ne s’est pas concrétisé, elle s’est rendu compte qu’elle pouvait quand même s’amuser. «Tout le monde me parle des carrières de Céline et de Ginette, mais si ça n’arrive jamais pour moi, ce n’est pas la fin du monde. Si je peux faire de la musique jusqu’au bout, je vais être heureuse.» 

SES ACTUS

Kim Richardson fait partie de la chorale de Y’a du monde à messe, à Télé-Québec. On pourra la voir sur scène à la Soirée Night Fever, le 14 avril, au Balcon, à Montréal. On pourra également l’entendre dans le spectacle Harmonium symphonique, du 8 au 17 juin, à la Maison symphonique de la Place des Arts. Aux mois d’août, septembre et octobre prochains, elle sera aussi en tournée avec Marc Hervieux dans le spectacle C’est si bon… de danser !

kimrichardson.com 

 

Photos : Andréanne Gauthier
Assistante-photographe : Alexe Grignard

Stylisme : Farah Benosman
Mise en beauté : Jean-François CD

 

 

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