Pierre Hébert: « C’est pas la fin du monde! »

Pierre-Hebert-Les-meubles
24 Fév 2020 par Pierre Hébert
Icon

La mère de Pierre Hébert trouve toujours les bons mots au bon moment. "Ce sont des mots tout simples, mais qui m’enlèvent instantanément mille livres de pression sur les épaules.»

J’ai 17 ans. Je suis attablé avec mes parents pour le souper. Je suis incapable de dire un seul mot. Un peu plus tôt dans la journée, j’ai appris que j’avais eu une note de 57 % dans un examen de philo. J’ai un échec. Je suis un échec. Le mot «échec» rebondit dans mon esprit et laisse des marques à chacun de ses rebonds. Tout s’écroule dans ma tête comme un jeu de dominos: je vais échouer mon cours, donc je n’aurai pas d’assez bonnes notes pour entrer à l’université, donc je vais rater ma vie!

Incapable de gérer la situation plus longtemps en silence, je fonds en larmes. Ma mère me demande ce qui se passe. Je raconte tout à mes parents. Ma mère met sa main sur la mienne, me regarde et me dit tout bonnement: «Pierre, c’est pas la fin du monde!»

C’est ma mère. Et, comme toutes les mamans, elle trouve toujours les bons mots au bon moment. Ce sont les mots que j’ai besoin d’entendre. Ce sont des mots tout simples, mais qui m’enlèvent instantanément mille livres de pression sur les épaules.

C’est ce dont j’ai envie de parler aujourd’hui. De la maudite pression.

Avant, dans les magazines, il y avait une pression indue: les femmes devaient toutes être belles, sexy, avoir des cheveux soyeux, de longs cils courbés, des fesses bombées, des seins rebondis, un teint impeccable et j’en passe. Après un bout de temps, collectivement, nous nous sommes rendu compte que ça mettait une pression énorme sur les épaules (et les corps!) des femmes et des jeunes filles.

On a donc décidé de promouvoir tous les types de physiques et de plutôt se tourner vers le bonheur! Vous avez déjà lu dans ce magazine plein de trucs pour être méga-giga-archi-heureuse. Vous êtes même en train de lire un numéro ayant pour thème «Moi, en mieux!»… Ce qui m’incite à me poser une question: est-ce qu’on ne devrait pas tous y aller mollo avec cette continuelle pression de s’améliorer?

Si vous êtes comme moi, vous avez lu le magazine en prenant mentalement des notes pour changer vos habitudes. «C’est décidé! Je me mets à courir, je mange moins de viande, je vais avoir plus confiance en moi et être plus zen!» D’ailleurs, cette pression ne sévit plus seulement dans les magazines; on la retrouve aussi sur Facebook et Instagram, où nos amis ont l’air d’être tellement plus heureux que nous! Sur les réseaux sociaux, tout le monde semble avoir déjà atteint la meilleure version de lui-même ou d’elle-même. Tout le monde a l’air d’y être arrivé… sauf nous.

Est-ce qu’on pourrait prendre tout ça avec un grain de sel? J’ai parfois le sentiment que, dans les médias traditionnels et numériques, on est passé de l’ère des «10 trucs pour avoir un corps parfait» à celle des «10 trucs pour filer le bonheur parfait». Et j’ai envie de vous dire que vous n’y arriverez pas. C’est irréaliste! J’ai envie de vous dire que votre «moi-même», il est déjà pas pire pantoute. Qu’il faut simplement être conscient que ce qui est proposé dans ces articles, ce sont juste des pistes, des suggestions. Surtout pas un mode d’emploi infaillible. Être heureux, c’est une suite d’échecs et de réussites. Être heureux, c’est une suite d’essais et d’erreurs.

Si jamais tu as succombé à une poutine alors que tu faisais attention à ce que tu mangeais cette semaine-là, si tu as écouté ta télésérie préférée au lieu d’aller courir, si tu as pogné les nerfs après tes enfants parce que tu avais ta journée dans le corps… bref, si jamais tu as l’impression de ne pas avoir réussi, cette semaine, à être «toi en mieux», approche que je te dise: «Hey! C’est pas la fin du monde!»

Pierre Hébert est un humoriste, animateur, auteur et acteur québécois. Pour plus d’information à son sujet, on visite le site pierrehebert.ca.

À lire aussi: 

Photo: Martin Girard



0 Masquer les commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse de courriel ne sera pas publiée.

Ajouter un commentaire

Magazine Véro

S'abonner au magazine