Il me semble qu’en été, y a que ma famille qui fait des activités qui se terminent mal. C’est immanquable. Si je planifie une sortie ou un séjour et que j’ai le moindrement des attentes, ça vire à la catastrophe.
J’ai l’impression d’être la seule dans cette situation-là, à cause des médias sociaux. Dès que le congé scolaire arrive, Facebook devient comme une tapisserie de milliers de photos de familles (parfaites) qui se lancent dans des tonnes d’activités où tout se déroule comme prévu.
Des photos de mes amies avec leurs enfants au parc d’attractions, en voyage à l’étranger, en road trip, en camping et à la mer. Des clichés où tout le monde sourit, où tout le monde a l’air heureux et zen.
Pis moi, ces photos-là, ça vient me chercher. Je les regarde avec intérêt et jalousie. Je scrute les petits détails. Y doit bien y avoir un indice qui nous montre que ce n’est pas parfait. Ben non, je ne trouve rien. Dès juillet, ça me met en maudit. C’est rendu que mon chum me prévient: «Ne regarde pas ton Facebook, tu vas encore penser que nos vacances sont poches.»
Parce que sur les réseaux sociaux, on dirait que ma vie de mère c’est du caca comparativement aux autres. On croirait qu’il n’y a que moi qui ne veux pas vendre un rein pour passer un bel été. Quand je vois les photos des autres, je me dis que leur période estivale, ben c’est rien que du gros fun pendant que moi j’essaie juste de garder mes enfants en vie et de survivre jusqu’à la dernière semaine d’août.
J’ai beau tenter de faire des activités spéciales, comme celles que je vois sur Facebook, ça fonctionne pas. On pourrait penser que seule ma famille est capable de «scrapper» un séjour à la mer. Oui, la mer, chez nous, ça marche pas. On est pleins de bonnes intentions, on fait six heures de route, les kids se chamaillent, je serre des genoux, je menace 19 fois d’en débarquer un sur le bord du chemin. Enfin arrivés, on traîne la poussette jusque sur la plage, mais les enfants ont trop chaud et le bébé n’aime pas le sable. Et moi, mes enfants, ils ne veulent pas se baigner dans la mer. L’eau est trop salée, ça pique, y a trop de vagues… Chaque fois, je me rends compte qu’on a fait toute cette route pour rien.
Mais sur les médias sociaux, y a juste moi qui vis ça…
Pareil pour le camping. Je suis bourrée d’optimisme avant de partir, mais 12 heures plus tard je pleure, roulée en boule entre deux bûches, dans mon sac de couchage. Une fois sur deux, on ne termine même pas le séjour tellement c’est difficile. L’année d’après, on en rit, mais sur le coup, je ne prendrais pas une photo pour la publier sur mon Facebook. Moi non plus je ne mets pas mes moments «poches» sur Internet.
C’est peut-être ça le problème, on montre juste le beau. Le vrai, l’ordinaire, on le cache. On se fait croire qu’on a une petite vie parfaite le temps d’un cliché. Les moments banals ou ratés, on ne veut pas les exposer, parce qu’après tout, on souhaite que les autres nous envient nous aussi.
Quand je vois passer ces photos entre deux activités manquées, ça me culpabilise de ne pas vivre d’instants aussi parfaits.
Mes résolutions pour cet été: accepter qu’il soit plus ordinaire qu’une photo parfaite. Avoir moins d’attentes et m’adonner à des activités plus simples, même si ça fait de moins bons statuts. Savourer les petits moments au parc ou à la piscine publique.
Et prendre des photos. Des photos vraies, pas parfaites.
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Photo: Andréanne Gauthier
Ce billet est paru dans le magazine VÉRO d’été.