Les couleurs genrées

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09 Mai 2023 par M. Geoffrion
Catégories : Famille / MSN / Véro-Article
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En couple avec une Maman2, M. Geoffrion jongle entre la garde partagée des ainés et le congé de maternité du p’tit dernier. Elle nous partage les histoires et les questionnements du quotidien de sa famille homoparentale.

Je suis la maman d’un magnifique garçon de 7 ans. Il est intelligent, gentil, serviable et très sensible à l’autre. Il possède énormément de qualités et gagne à être connu, mais mon garçon a ce que certains se plairaient à appeler un défaut : il aime le rose.

Mon coco n’aime pas que le rose, il aime aussi les paillettes, les licornes, les fleurs et les arcs-en-ciel. Lorsqu’il était petit, il se plaisait à porter des bas à l’effigie des princesses Disney et des caleçons de Stella et Everest de la Pat’Patrouille. Il a enfilé à plusieurs reprises des robes d’Elsa et se prend régulièrement pour Isabella dans ses jeux d’Encanto. Mon fils est naturellement attiré par ce qui est genré féminin.

À la garderie, personne n’en a fait de cas. Il a reçu quelques commentaires d’un petit garçon de son âge à l’effet qu’il portait des bas «de fille», mais l’éducatrice a su rapidement reprendre le tout avec eux d’une main de maître.

Mon fils est maintenant au primaire. Lors de son dernier anniversaire, nous avons invité des amis de sa classe. Les parents m’ont demandé de suggestions cadeau pour lui. J’ai donné plusieurs idées inspirées des intérêts de mon fils. Ces intérêts se situent tous dans la section «fille» des magasins de jouets. J’ai été étonnée et même déçue de voir qu’un seul parent avait procuré à mon fils un jouet genré féminin. Tous les autres lui ont donné un jouet genré masculin (avec lesquels il ne joue pas, malheureusement). C’est à ce moment que j’ai réalisé qu’il y a encore un certain malaise social face aux enfants qui ne se conforment pas à des intérêts typiquement liés à leur genre.

Mon garçon présente les mêmes intérêts qu’avant, mais depuis la rentrée scolaire, pour une raison qui nous échappe, il s’auto-raisonne et n’aborde pas de ses intérêts avec ses pairs. Il porte des vêtements genrés masculins à l’école, et laisse à la maison ce qui est genré féminin. Pourtant, au magasin, il est attiré automatiquement par la section des filles et demande à ce qu’on lui achète des souliers roses, par exemple. Au moment de les porter, il ne le fera qu’à la maison et non à l’école. Lorsque nous le questionnons à ce propos, il nous dit que tout le monde rira de lui s’il porte des vêtements/accessoires de fille à l’école, que les garçons ne peuvent pas porter des choses de filles.

Une part de moi trouve excessivement triste de voir qu’un garçon de 7 ans a déjà intériorisé que ses intérêts ne sont pas les bons et qu’il doit se conformer à une étiquette afin d’avoir une place au sein de ses pairs. Il y a des moments où je me demande si nous n’avons pas échoué, en tant que parents, puisque notre fils laisse une partie importante de lui-même dans l’ombre au profit de cette normalité à laquelle nous n’adhérons pas.

Est-ce à mon fils de réprimer ses intérêts ou à la société de revoir sa façon de concevoir les genres? Lorsque l’on fait une recherche sur les couleurs genrées, on peut rapidement constater que la mise en place de cette convention sociale n’a qu’une visée économique. Associer certaines sphères aux garçons et d’autres aux filles crée une impossibilité de «donner au prochain». J’achèterai un vélo à motifs de fusées à mon garçon et un autre à motifs de princesses pour ma fille. Deux enfants, deux vélos. Au contraire, si j’ai un vélo neutre, il passera de mon fils à ma fille sans soucis. Cela est moins profitable d’un point de vue «consommation».

Pour que je dépense plus, mon fils réprime une partie de sa personnalité. Pour que les grandes compagnies profitent davantage, mon fils dénature ses goûts et préférences. À 7 ans, il a déjà intériorisé un concept social, une normalité très subjective, n’ayant comme objectif que de remplir les poches de dirigeants fortunés. Comme société, il me parait essentiel d’avoir une réflexion objective sur le sujet.

Nous tenterons d’enseigner à notre fils que les couleurs et les concepts n’ont pas de genre. Nous essayerons de faire grandir sa confiance en soi et sa capacité à s’affirmer dans le respect de sa personne. Mais, si nous sommes seules à contre-courant, pourrons-nous l’outiller suffisamment pour qu’il soit confortable d’afficher ses vraies couleurs ?



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