Pierre Hébert: L’héritage de mon père

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16 Juin 2021 par Pierre Hébert
Catégories : Famille / MSN / Véro-Article
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Quand j’ai su que j’allais être papa pour la première fois, je me suis souvent demandé ce que je dirais à mes enfants pour leur apprendre les «leçons de la vie».

Et plus le ventre de ma blonde grossissait, plus ma liste de choses à leur enseigner s’allongeait. «On doit dire “merci” et “s’il-vous-plaît”… La famille, c’est plus important que tout… Entourez-vous de gens qui vous aiment et pour qui vous êtes vraiment importants…» Bref, j’étais rempli de bonnes intentions et, surtout, de naïveté.

À 40 ans, pour la première fois de ma vie, j’ai essayé de me souvenir des paroles que mon propre père m’a dites et qui m’ont le plus marqué ou inspiré. Je m’attendais alors à me remémorer des phrases dignes d’une prophétie, comme celles qu’on entend parfois à la fin d’un film grandiose et qui en révèlent tout le sens. Le genre de phrase qui mérite d’être inscrite sur un mur dans une classe de yoga et qui nous laisse bouche bée pendant quelques secondes.

Je me suis mis à chercher cette phrase et puis… rien. Absolument rien. Je ne me rappelais d’aucune phrase qui m’avait marqué et que j’aurais pu répéter à mon tour à mes enfants. Par contre, je me souvenais d’une tonne d’images dont j’ai alors perçu tout le sens.

Je revois mon père en train de faire rire ma mère. Un rire spontané, que je n’entends que lorsqu’elle est avec lui et personne d’autre. J’ai aussi l’image de parents complètement amoureux qui se font des câlins, qui s’embrassent et qui se comprennent, même de loin dans un party, juste en se regardant, complices, sans avoir besoin de parler.

Jamais mon père ne s’est assis à côté de moi pour m’expliquer comment on doit traiter une femme. Jamais mon père ne m’a dit à quel point c’est important de la faire rire, d’être son complice, de lui montrer qu’on la trouve parfaite, de ne jamais la tenir pour acquise et de l’encourager dans ses projets et ses défis. Il ne m’a jamais rien dit de tout ça, mais il l’a fait devant mes yeux chaque jour de mon enfance.

Pas besoin de grandes phrases philosophiques pour nous apprendre tout ça. Il n’y a que la vie, sa routine et ses quelques moments de grâce, ici et là, qui se répètent encore et encore et qui nous imprègnent sans même qu’on en soit conscient.

Je me rappelle avoir vu mon père pleurer sur son lit, épuisé et découragé. Je me rappelle avoir appris ce jour-là qu’un homme se doit avant tout d’être vrai plutôt que fort. Je me rappelle avoir vu mon père faire le ménage et les repas parce qu’une maison et une famille, ça s’entretient et ça se construit en équipe. Je me rappelle avoir vu mon père ajouter des couverts sur la table quand les amis ou la parenté se pointaient chez nous sans prévenir, parce que de la place et de la bouffe, il y en a toujours pour ceux et celles qu’on aime.

Je me rappelle que mon père me présentait ses excuses après avoir été impatient. Il ne l’a jamais su, mais aujourd’hui, si je m’excuse auprès de mes enfants, c’est parce que je me souviens encore de comment je me sentais quand il l’a fait. De comment, du haut de mes 9 ans, j’ai senti le respect qu’il avait pour moi et j’ai compris que notre relation était plus importante pour lui que le besoin «d’avoir raison».

Grâce à mon père, j’essaie à mon tour d’imprégner le quotidien de mes enfants d’images marquantes. J’aime qu’ils me voient partir travailler avec le sourire, en espérant leur donner envie de trouver un emploi qui les comble de bonheur. J’aime qu’ils me voient pleurer, parfois, en comprenant que ça fait partie de la vie et que je ne suis pas faible pour autant. J’aime qu’ils me voient amoureux de leur mère à tel point que, même s’ils sont à côté de nous, c’est comme s’ils disparaissaient pendant quelques secondes et que leur mère et moi étions seuls au monde.

J’aime l’idée que, sans même le savoir, ma blonde et moi leur apprenons à être heureux, à prendre soin des autres et d’eux-mêmes. J’aime l’idée que, sans le savoir, du haut de ses 4 ans, mon fils apprend déjà doucement à être un bon papa, si ça devient son choix un jour. Après tout, on ne sait jamais: peut-être qu’à 40 ans, il s’assoira lui aussi pour écrire des mots qui voudront simplement dire: «Merci papa, merci pour tout.»

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Photo: Martin Girard



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  1. Lise Castilloux dit :

    Des fois à mon jeune âge 67,,je me dis les vedettes non pas détiennent la vérité loin de là,mais ils ont le pouls d’actualités,,mais câline que je n’aimerais être ou ne pas me prendre vedette c’est ben trop intense cette introspection de vos vies amoureuses, familiales ,,je vous lis j’apprécie aussi mais je ne vous envie pas..soyez heureux

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