SOS enfant timide: trucs et conseils pour l’aider à surmonter son malaise

01 Juil 2016 par Maude Goyer
Catégories : Famille
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Une étude de l’Université du Maryland révèle que de 15 à 20 % des enfants seraient de nature timide. Voici des trucs et conseils d’expertes pour aider notre tout-petit à surmonter son malaise.

Lili, 5 ans, a du mal à entrer en contact avec ses amis à la garderie. Tout ce qui est nouveau lui de- mande plus de temps d’adaptation et elle déteste que l’attention se porte sur elle. Lorsqu’un adulte lui dit bonjour, elle ne répond pas. Et baisse la tête. Un comportement qui chicote Johanne, sa mère: «À la maison, pourtant, elle n’est pas du tout comme ça, confie la Montréalaise, maman de trois enfants. C’est vrai que Lili n’est pas très démonstrative, mais elle est enjouée et autonome.»

Selon une récente étude de l’Université du Maryland, la timidité toucherait de 15 à 20 % des enfants. Céline Picard, psychologue à la clinique du Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine, définit ce trait de personnalité comme «une difficulté à tolérer, à accepter le regard de l’autre. Un enfant timide aura ainsi du mal à s’exprimer et à s’affirmer vis-à-vis des autres.» Bien que la timidité ne soit pas considérée comme un «trouble anxieux», elle en intègre un des aspects: le faible sentiment d’efficacité personnelle, note la psychologue familiale Nadia Gagnier. Autrement dit, un enfant timide se sent inadéquat dans une situation inconnue et il tente de l’éviter en se refermant.

Un vrai problème?

Alors que la gêne est un sentiment passager qu’on peut tous éprouver à l’occasion, la timidité, elle, fait partie intégrante de la personne. Elle découle à la fois du tempérament à la naissance et des acquis, dont les expériences de vie, le style d’éducation et les apprentissages sociaux, énumère Mme Gagnier. Abondant dans ce sens, Céline Picard croit que l’environnement joue un grand rôle dans le développement de la timidité chez l’enfant. «Un bébé très insécure pris en charge par des parents qui composent bien avec ce genre de comportement a de grandes possibilités de changer, d’être apaisé», soutient-elle.

Chose certaine, les deux psychologues partagent le même avis sur ce point: la timidité n’est pas un problème en soi… tant qu’elle ne domine pas toutes nos autres émotions et, éventuellement, nos gestes et nos comportements. «C’est l’individu qui contrôle sa timidité et non celle-ci qui contrôle sa vie», résume Mme Gagnier, qui se définit elle-même comme une personne timide. Quand la timidité freine les marques de politesse (comme saluer quelqu’un), ou qu’elle empêche un enfant de demander quelque chose (comme se rendre aux toilettes), ça devient plus préoccupant.

«Durant la journée, si Lili a soif, elle n’osera pas demander à l’éducatrice d’aller boire de l’eau», se désole Johanne. Pour sa part, Véronique, la maman de Lilou, 5 ans, se souvient de soirées complètes passées avec sa petite dans les bras lorsqu’elles étaient en visite. «Je ne pou- vais pas la déposer et elle ne voulait pas se faire prendre par personne d’autre que moi», dit-elle. Aujourd’hui, sa fille est encore mal à l’aise en compagnie de qui- conque en dehors du cercle rapproché, même s’il s’agit des membres de sa famille élargie (grands-parents, oncles, tantes, etc.).

Rôle parental: les stratégies gagnantes

Embarrassé, le parent de l’enfant timide développe parfois le réflexe de répondre à la place de son enfant… ce qui est une erreur! «Le premier conseil que je donne aux parents d’enfants timides, c’est de ne pas envoyer le message que leur enfant est timide, affirme Maude Dubé, éducatrice spécialisée et intervenante auprès des fa- milles dans un CLSC. Sans le vouloir, le parent qui cherche ainsi à protéger son enfant lui appose une étiquette.» Or, cette attitude conforte l’enfant dans sa peur: si son père ou sa mère répond pour lui, il en déduira que sa peur est justifiée et qu’il est préférable que ses parents s’occupent de la situation.

Les parents devraient faire preuve de tolérance et se montrer un peu plus étanches à la pression extérieure, estime Céline Picard: «Ne volez pas trop vite au secours de votre enfant», lance-t-elle, avant d’ajouter que «le parent n’a pas à prendre des précautions en amont, car autrement, c’est comme s’il demandait à l’environne- ment de s’adapter à l’enfant plutôt que l’inverse». Or, élever un enfant, c’est aussi l’aider à se développer sur plusieurs plans, dont celui de l’adaptabilité.

Peu importe la situation (on reçoit des gens à la maison, on leur rend visite, on rencontre quelqu’un que notre enfant ne salue pas en retour, etc.), les trois spécialistes suggèrent de préparer d’abord le terrain et d’y aller petit à petit. «On de- mande à l’enfant ce qu’il est prêt à faire et on lui donne un petit défi», recommande Maude Dubé. Une approche que conseille aussi Nadia Gagnier: «Par exemple, si on reçoit des amis à la maison, on peut dire à notre enfant: “J’aimerais que tu leur dises bonjour et que tu les regardes dans les yeux, mais on va y aller doucement. Aujourd’hui, je te demande juste de ne pas te cacher derrière moi quand ils arriveront et de les saluer quand tu te sentiras prêt.” Et la prochaine fois, l’enfant pourra passer le plateau de crudités. C’est une tâche valorisante pour lui et, comme il y a un objet entre lui et l’invité, c’est moins gênant.»

Et si notre fiston ou notre gamine ne remplit pas la mission qu’on lui a assignée? Si la timidité freine l’enfant au point qu’il finisse par passer la soirée tapi dans sa chambre? Céline Picard suggère alors de ne rien faire sur-le-champ. «On laisse l’enfant réagir comme il le peut sur le coup et on intervient plus tard. En lui disant par exemple “je sais que c’est difficile pour toi”, on souligne aussi ce qui s’est bien passé durant la réception. Parce que ce qu’on veut, c’est qu’il retienne les moments où il s’est bien senti.»

Car l’enfant timide qu’on pousse ou qu’on force à faire quelque chose contre son gré peut réagir fortement. Bonjour la crise! Dès lors, le malaise devient encore plus grand… pour tout le monde. À ce propos, Maude Dubé rappelle que la période du 0 à 5 ans est cruciale pour instaurer des règles et créer des habitudes. «Il n’est pas trop tard par la suite, mentionne-t-elle, mais il faudra d’abord se défaire de l’habitude à corriger pour en créer une autre. Et quand le mauvais pli est ancré, c’est évidemment plus long.»

De timide à anxieux

Si elle n’est pas efficacement prise en charge par les parents, la timidité d’un enfant peut devenir envahissante et même se transformer en anxiété ou en phobie sociale. «Il s’agit d’une peur marquée des situations sociales, qui se caractérise par la crainte d’être jugée, explique la psychologue Nadia Gagnier. Cette crainte peut pousser la personne atteinte à l’isolement et à l’évitement.»

Pour cette raison, les trois spécialistes interviewées dans le cadre de cet article font valoir qu’il ne faut pas éviter les contextes dans lesquels notre enfant pourrait se sentir timide. Au contraire! «En multipliant les occasions de socialiser, l’enfant y sera davantage exposé et fera des petits pas pour vaincre sa timidité», note Maude Dubé.

Et si, malgré nos encouragements et nos interventions, notre enfant semble incapable de s’affirmer et de prendre sa place? S’il continue à réagir fortement à toute activité ou situation nouvelle, jusqu’à en pleurer, se mettre en colère et ne plus vouloir quitter la maison? On consulte sans hésiter. «Et mieux vaut consulter plus tôt que trop tard», déclare Nadia Gagnier. Tout ce qu’on risque, dans le premier cas, c’est que le nombre de séances soit moins élevé!

Des outils ludiques… et efficaces!

  • Des livres comme Oscar le timide (Actes Sud, de 0 à 2 ans), Gaston n’ose pas jouer au ballon (Lipokili, 3 ans et plus), ou Rouge timide (Soulière, 8 ans et plus): ces lectures dédramatisent
le problème et ouvrent la discussion.
  • Les jeux de société qui requièrent une interaction: ils développent la capacité de l’enfant à s’affirmer et à prendre des décisions, des aptitudes qui lui font gagner en confiance.
  • Des jeux de rôle, des figurines, du théâtre: ils permettent aux enfants timides de s’exprimer sous les traits d’un personnage.
  • Un animal de compagnie: en plus d’être une source de réconfort, il devient souvent un confident.

 

Photo: Stocksy

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