Ces femmes qui nous inspirent : Martine St-Clair

20 Déc 2022 par Véronique Harvey
Catégories : Culture / MSN / Oser être soi / Véro-Article
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Et si la vie commençait à 60 ans? On en a l’impression en écoutant la chanteuse Martine St-Clair qui, du haut de ses 60 printemps, se réjouit d’avoir enfin trouvé l’harmonie entre son coeur, sa tête, son corps et son art.

Les années qui passent ne semblent pas vous affecter outre mesure, Martine. Auriez-vous trouvé la recette magique pour vieillir avec tant de sérénité?

Non, malheureusement. (rires) Mais je trouve que c’est un privilège de vieillir. J’ai 60 ans et je suis heureuse parce que j’ai la chance de continuer à faire ce que j’aime, mais aussi de comprendre comment on se sent à 20 ans, 30 ans, 40 ans… Si le passé est garant du futur, je peux regarder en arrière pour voir ce que j’ai fait… et ce qui m’attend.  Le plus important, pour moi, c’est d’être en harmonie avec ce que je suis. Parce que quand on n’est pas en harmonie – et dieu sait qu’il y a des moments où je ne l’étais pas! –, on n’écoute plus son intuition. On part avec un flambeau dans les mains et on se lance dans une course folle.

 

Et votre reflet dans le miroir, comment le trouvez-vous à 60 ans?

Si tu me parles d’apparence, c’est certain que je suis coquette, que j’aime la mode et bien me présenter. Mais que personne ne me demande d’avoir l’air de 40 ans, car j’en ai 60 et je veux vivre avec cet âge-là. D’ailleurs, je suis fatiguée de ces conversations sur les rides, le maquillage et les crèmes miracles. Peut-on parler d’autre chose? Après la pandémie, quand je suis retournée sur scène pour la première fois, j’avais un trac fou.

Mais tout d’un coup, l’image qui m’est venue en tête était celle de laisser tomber mon masque. Collectivement, on a vécu des années difficiles et c’est comme s’il y avait maintenant un désir de dire les vraies choses. On a besoin de vrai. Alors, est-ce qu’on peut se parler des vraies affaires? Nos cheveux gris et nos rides, ce n’est rien. Quels sont les vrais enjeux? Et moi, qu’est-ce que je peux apporter de plus à la société? On en revient à ce qui est important, selon moi: chercher à l’intérieur de nous ce qui nous fait du bien, chercher l’harmonie.

 

Cet équilibre dont vous parlez, comment l’avez-vous atteint?

En revisitant le passé. Quand j’ai célébré mes 40 ans de carrière, j’ai réalisé tout le chemin que j’avais parcouru… mais aussi qu’il y avait encore tellement de choses à faire! Je me suis demandé quels projets me feraient vraiment plaisir, maintenant. C’est à ce moment-là que je me suis rendu compte que je n’avais jamais enregistré d’album devant public durant ma carrière solo. Alors je me suis lancée et c’est comme ça qu’est né l’album Les retrouvailles. Ça m’a appris plein de choses sur moi, ce retour en arrière. J’aime ressentir ce qui se passait à l’époque de telle ou telle chanson, pas pour le recréer, mais pour mettre en perspective là où je suis rendue aujourd’hui. Cet album-là a fait ressortir des polaroïds du passé pour me rappeler tout ce que j’avais fait. Je l’ai bâtie, ma carrière, j’ai travaillé fort, j’ai provoqué des rencontres. Il y a eu des moments où les gens ne comprenaient pas mes choix, mais moi, je savais que je devais me faire confiance. Il faut toujours écouter notre coeur et suivre notre intuition. Ça semble élémentaire, mais des fois, se questionner sur les décisions qu’on a prises dans le passé, ça nous en apprend beaucoup sur nous-même. Et avec du recul, on peut constater ce que ces décisions nous ont apporté.

On m’a souvent dit que je ne parlais pas assez de ma vie privée. J’en parle, mais dans mes chansons… et maintenant, dans mes tableaux.

Faisons l’exercice: avec le recul, quelles décisions vous félicitez-vous d’avoir prises?

Avoir accepté le rôle de Cristal dans Starmania. Ç’a été le début de tout, pour moi. Ça m’a permis d’interpréter Monopolis, ce texte magistral de Luc Plamondon. C’était mon Imagine à moi, mon drapeau de liberté. Quand je chantais ces mots, à 17 ans, je les trouvais donc visionnaires: «Dans les villes de l’an 2000, la vie sera bien plus facile, on aura tous un numéro dans le dos…» Dans ma tête, c’était comme de la science-fiction. Sinon, je peux dire que la pièce Il y a de l’amour dans l’air, une des chansons phares de ma carrière, je ne voulais pas la chanter au début. Elle me faisait peur. Quand j’ai lu ce texte dans lequel une jeune femme voyait l’amour autour d’elle, mais sans l’avoir jamais connu, j’ai eu peur d’être stigmatisée, alors j’ai dit non. Mais mon père m’a convaincue d’aller l’essayer en studio. J’ai affronté ma peur de chanter ces mots-là… heureusement! Je la chante encore maintenant avec fierté, mais elle prend un tout autre sens. Aujourd’hui, j’ai compris que sans amour, on ne vit pas. Je ne parle pas ici de l’amour avec un grand A. Je parle d’aimer ce qu’on fait, d’aimer nos amis, notre famille, la vie. Donc oui, je confirme qu’il y a toujours de l’amour dans l’air.

 

Ah, l’amour! Ç’a été votre sujet de prédilection tout au long de votre carrière. Parlez-nous maintenant du coup de foudre que vous avez eu pour la peinture, à la fin des années 1990…

Toute ma vie, j’ai été impressionnée et inspirée par plein de formes d’art. Quand j’étais en congé, je lisais des biographies de peintres, d’acteurs, de designers de mode. Sans le savoir, j’étais attirée par l’approche pluridisciplinaire. Mais c’est quand je suis allée vivre quelques mois chez ma soeur, à Toronto, où j’ai visité des galeries d’art, que le déclic s’est produit. J’ai eu des coups de foudre pour de grands peintres de l’art abstrait, comme Mark Rothko et Gerhard Richter. Je me suis alors dit que si je devais me trouver un jour une nouvelle forme d’expression artistique, c’est celle-là que je choisirais. Puis, quand je suis revenue à Montréal, j’ai décidé de m’équiper, d’explorer, de me lancer… et ç’a été le début.

Le début de quoi, exactement?

D’une autre belle histoire d’amour. D’ailleurs, mon prochain grand projet, qui devrait voir le jour en 2023, est axé sur mon art visuel et mon art chanté. Les deux vont se jumeler. Ce seront des conversations entre la peinture et la poésie. Comme si un miroir faisait un jeu d’aller-retour entre les couleurs et les mots. À mes yeux, c’est un projet magique!

 

Peut-on dire que ces deux formes d’art sont devenues indissociables pour vous?

Absolument. Parce que maintenant, quand je peins, je vois des mots, j’entends des sons, je perçois des émotions. Et quand je chante, je vois des couleurs. D’ailleurs, quand je reviens d’un spectacle, il n’est pas rare que j’amorce une esquisse, un éclatement de couleurs et de bonheur. Les deux sont donc interreliés. Et comme pour mes chansons, chaque tableau a son histoire qui est aussi mon histoire, ma vision de la vie, de la société. On m’a souvent dit que je ne parlais pas assez de ma vie privée. J’en parle, mais dans mes chansons… et maintenant, dans mes tableaux. Pourquoi en ajouter quand tout y est?

SES ACTUS

La tournée Les retrouvailles de Martine St-Clair commence en janvier et son prochain projet, alliant arts visuels et chansons, devrait aussi voir le jour en 2023. Entretemps, on peut découvrir et acheter ses oeuvres d’art et ses bagues sur le site martinestclair.com.

Photos : Andréanne Gauthier
Stylisme : Vanessa Giroux
Mise en beauté : Amélie Bruneau-Longpré

 

 

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