C’est certain que je suis introvertie, stressée, gênée, toujours fatiguée et que je ne raffole pas des foules ni du small talk. Je souffre aussi d’un TAG (trouble d’anxiété généralisée) et des relents d’une dépression et d’un burnout qui datent de quelques années. La totale, quoi! Le jackpot. Rien pour m’aider.
Sauf que je ne parle même pas de ça, ici. Cette année, alors qu’on est pourtant enfin «déconfinés», je suis Épuisée. Avec un «É» majuscule. «All the women. In me. Are tired», comme l’écrivait la poétesse américaine Nayyirah Waheed. L’année qui s’achève m’a presque achevée, moi aussi. Le flot incessant de mauvaises nouvelles sur les plans écologique, politique, social, culturel, féministe et bien plus encore ont eu raison d’une partie de ma joie de vivre et de mon énergie. Je pensais pourtant m’être presqu’entièrement immunisée – au même rythme que je recevais mes doses de vaccins anti-COVID-19 – aux bulletins de nouvelles et aux scoops déprimants, stressants ou carrément «décalissants». À force d’en entendre parler… Pandémies, féminicides, désastres naturels, dénonciations d’agressions ou d’inconduites sexuelles, maladies, inflation, pénuries, grèves, guerres : qu’on l’évite ou qu’on l’affronte, l’actualité est anxiogène, c’est le moindre qu’on puisse dire. Sauf que cette année, c’est là que tout me rentre dedans. Comme un mur de briques que j’aurais frappé à 100 miles à l’heure avec ma bicyclette et pas de casque protecteur. Peut-être avez-vous frappé votre mur en 2020, vous? Ou en 2021? Moi, c’est maintenant.
J’aime ma famille, mes amis, mes proches et moins proches profondément. Sincèrement. Entièrement. Plus que jamais, j’aurais envie de me réfugier dans les bras réconfortants de ma maman, de refaire le monde le temps d’une soirée avec ma meilleure amie, de rire jusqu’à en avoir mal aux joues avec mes nièces, d’embrasser à chaque nuit sous le gui ma fiancée. J’aurais le goût de penser à autre chose qu’à tout ce qui va mal dans le monde, de tout oublier, de m’oublier, pendant deux semaines festives, où mon plus grand questionnement – assez existentiel, vous en conviendrez d’ailleurs – demeurerait : «Vais-je prendre une deuxième portion de tourtière avant le dessert?» (Oui. La réponse à ces questions est toujours oui.) Sauf que je n’y arrive pas. J’ai le cœur en berne.
Vous me direz que je suis déprimante, voire fataliste. Je vous répondrai que oui, fort probablement. Sauf que je n’y peux rien et que je suis à peu près certaine de ne pas être la seule à me sentir ainsi. Peut-être traînez-vous également une lourdeur qui rend vos pensées et vos mouvements moins joyeux, moins légers. Si c’est le cas, je vous partage mon truc pour survivre aux Fêtes de fin d’année : plutôt que de m’apitoyer sur mon sort en boule sur le sofa, j’ai décidé d’opter pour la stratégie «fake it ‘til you make it». (Bon à savoir : c’est aussi la stratégie que j’ai utilisée dans le passé pour booster ma confiance corporelle, et ça m’a quand même plutôt bien réussi…)
J’ai donc décidé d’accrocher un sourire sur mon visage et un chapeau de père Noël sur ma tête, et de me lancer corps et âme dans 1001 préparatifs festifs qui me feraient du bien. Pour moi, ça passe par du bénévolat auprès de personnes moins fortunées, par l’achat de cadeaux qui font vraiment plaisir à mon entourage (je préfère de loin les activités ou expériences aux présents dénichés en magasins!) et par la confection de biscuits et autres desserts de Noël sur fond de Mariah Carey qui s’égosille sur son «All I Want For Christmas Is You» (impossible d’être irritée ou déprimée en cuisinant des petites douceurs sur cette chanson, promis juré!)
Pour le reste, je me laisse la chance, dans les prochaines semaines, de laisser venir les émotions – négatives ou pas – et de les vivre sans les juger, ni me juger. En me rappelant que j’ai tant de beaux privilèges, comme un toit sur ma tête, des cadeaux sous mon sapin et un repas à partager avec des êtres qui me sont très chers, qui ne s’achètent malheureusement pas en cadeau, même avec tout l’or du monde. Et ça, c’est bien assez pour me convaincre que le temps des Fêtes, cette année, sera aussi beau et doux que je le laisserai être.
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