Vive d’esprit, pétillante comme un bon champagne, l’actrice et animatrice a décidé de faire sauter le bouchon de sa vie pour que jaillisse l’harmonie. Petites bulles sur sa nouvelle autonomie.
Mélanie Maynard juge que cette citation du philosophe américain Henry David Thoreau lui va comme un gaut: « Si un homme ne marche pas au pas de ses camarades, c’est qu’il entend le son d’un autre tambour. C’est beau, hein? Certains avancent dans la vie en ligne droite. Moi, je zigzague. Je ne rentre pas dans le moule. J’ai fait des tonnes d’efforts pour me conformer aux attentes des autres mais, désormais, je choisis d’écouter mon tambour. » Une mégaremise en question: voilà ce que la comédienne vit depuis quelques mois.
Le bleu électrique du tricot norvégien qu’elle porte fait ressortir l’auburn de sa belle crinière. C’est pourtant le rouge feu de la combinaison spatiale de Pétrolia qui s’impose à moi quand je la regarde. Et pour cause! Comment oublier la médecin surréaliste de l’équipage délirant de Dans une galaxie près de chez vous, la série culte créée en 1998 qui a lancé la comédienne en orbite. Depuis, elle a étoffé son CV, comme actrice (Caméra café, Belle-Baie…) et en tant qu’animatrice (Deux filles le matin, Ça finit bien la semaine, Ma maison Rona, Juste pour rire en direct…). Le temps a passé, mais elle n’a pas changé: même teint frais, même bouille juvénile, même… «Merci. Sauf qu’à 42 ans, notamment grâce à Insanity, un programme d’entraînement très exigeant, mais incroyablement efficace, je suis enfin satisfaite de ma carrosserie!»
Bousculer les idées reçues
Rien n’a changé extérieurement. Intérieurement, par contre, tout se bouscule. «C’est exténuant! Une petite lobotomie serait bienvenue par moment.» L’automne dernier, dans la tourmente, Mélanie s’est séparée de l’homme qui partageait sa vie depuis 13 ans et qu’elle avait épousé en août 2012 au cours d’un mariage de conte de fées en Italie. Un tremblement de coeur que personne n’avait vu venir. Pas même elle. Crise de la quarantaine? Peut-être. Crise existentielle, certainement. «J’avais une belle grosse maison, je faisais de beaux voyages, j’organisais des partys fabuleux, j’avais tout. Sauf l’essentiel. Un matin, j’ai réalisé que, tabarouette, j’étais loin de ce que je voulais vraiment dans la vie. J’ai fait reset, on réinitialise.»
L’actrice et animatrice est lucide. «J’ai grandi dans une famille modeste de L’Ange-Gardien [en Montérégie]. La vie de princesse, j’en rêvais. Je l’ai eue. Par la suite, j’ai tellement voulu prouver que tout était extraordinaire – y compris notre famille recomposée [elle est la maman d’une fille de 17 ans, née d’une union précédente, et d’un fils de 9 ans, qu’elle a eu avec son dernier conjoint, lui-même père de deux filles] – que, forcément, tout le monde m’a crue.»
Bien sûr, la séparation a fait mal aux gens autour d’elle… «Je ressens de la culpabilité mais, en même temps, je sais que j’ai agi au mieux pour moi et pour mes enfants. Décliner le verbe “avoir” n’apporte pas le bonheur; je veux conjuguer le verbe “être”.» Fini les diktats! Basta, les modèles imposés par la société! Ces interminables listes de «à faire» pour ressembler à une superwoman? Du balai! «Je veux remplacer les “Il faut que…” par des “Ça me tente de…”. Me rebrancher sur le plaisir. J’ai le goût que ma vie ressemble à une grosse doudoune confortable.»
Revendiquer l’imperfection
Étrange constat: la Mélanie sérieuse en face de moi n’est pas «raccord» avec le personnage de fille funny à laquelle elle nous a habitués. «Faire rire m’a permis de gagner la sympathie des gens et j’en suis ravie. Maintenant, j’ai envie de les toucher autrement. De leur donner accès à une autre part de moi-même.»
Soit. Alors, qui est Mélanie Maynard en trois mots? «De un, je suis humaine, avec ce que le terme sous-entend de force et de faiblesse. De deux, je suis “insécure”: je me perçois encore comme petite, inachevée. Le doute m’habite. Et de trois, je suis mêlée! J’aurais dû commencer par ce mot tellement il me définit!» Mêléeee… comment? «Pas focus! répond en riant celle qui a reçu un diagnostic de trouble du déficit de l’attention (TDA). Je n’ai aucun plan de carrière et, question gestion d’image, je ne suis pas businesswoman pour deux cennes. En revanche, mon cerveau en ébullition est fort créatif!»
La grande sortie en atteste. Présentée au Théâtre du Rideau Vert au début de l’année, cette pièce signée Mélanie Maynard et Jonathan Racine et portant sur une famille éclatée qui revisite ses souvenirs a connu un succès populaire. Avec quelques bémols côté critique. C’était écrit dans le ciel, juge l’auteure en soupirant. «Quand le grand public aime, certains critiques font automatiquement la fine bouche.»
L’inévitable scission intello-populo la désole. «Animer GPS Monde, à TV5, m’a permis de me bâtir un nouveau public, plus intellectuel. Excellent. Mais je participe aussi avec joie au Tic tac show, à V! Ce snobisme qui nous force à être d’un côté ou de l’autre, ça me tue.» Aucun doute, la comédienne est bien dans sa peau à tous les réseaux. Par contre, elle confesse qu’elle a longtemps eu le complexe de la-fille-qui-a-étudié-en-théâtre-mais-qui-au-final-a-peu-joué. Prêter ses traits cette saison à Marie Coallier, femme de tête et de conviction de la série 30 vies, a été pour elle une véritable bénédiction. «Comme actrice, j’ai repris confiance en moi.»
La suite de l’entrevue en page 2.