Récemment, j’avais une discussion avec une collègue psychoéducatrice qui s’investit dans plusieurs domaines et projets en relation d’aide. Cette collègue est, sans grande surprise, épuisée. Elle me l’a d’ailleurs clairement verbalisé: «Je ne peux pas arrêter: les autres ont besoin de moi! Je me suis engagée auprès d’eux!»
À ce propos, un constat s’impose: malheureusement (ou plutôt heureusement!), les autres arriveront à se passer de nous, du moins momentanément. Parce qu’une autre personne pourra prendre la relève ou parce qu’ils développeront des outils pour prendre soin d’eux-mêmes.
Mais nous, nous ne pouvons pas nous passer de nous-même! Nous sommes notre propre essence, c’est-à-dire la seule personne avec laquelle nous sommes assurée de passer le reste de nos jours. You can’t pour from an empty cup, ai-je récemment lu quelque part. Littéralement, cela signifie que si notre tasse est vide, aucun liquide ne peut en sortir et abreuver quoi que ce soit – ni nous-même, ni les fleurs que nous voulons arroser.
D’où nous vient donc cette capacité à donner sans compter aux autres… tout en s’oubliant soi-même? Pourquoi a-t-on l’impression d’agir égoïstement lorsqu’on se donne à soi d’abord?
Évidemment, il y a une (grande) part d’acquis, d’éducation, de transmission intergénérationnelle et de résidus de judéo-christianisme derrière tout ça (oui, oui, même si on n’est ni croyante ni pratiquante). Collectivement, nous avons été élevées pour soigner, réconforter, rassurer et faire passer les autres avant nous. On se sent valorisée lorsque nous agissons ainsi. On reçoit la reconnaissance des autres et le sentiment de faire la bonne chose. Cette éducation qu’on a reçue explique en bonne partie pourquoi nous sommes autant de femmes à travailler dans le domaine des soins, à titre d’infirmières, de psychologues, d’éducatrices, de travailleuses sociales… alouette! Je fais d’ailleurs partie de cette catégorie d’employées et j’aime profondément ce que je fais!
Cela dit, je me questionne: comment se fait-il qu’on arrive à trouver les mots justes et une attitude réconfortante pour nos enfants, nos meilleures amies, notre partenaire et les personnes auprès de qui nous travaillons… alors que c’est souvent si difficile de s’offrir cette même douceur?
Mon hypothèse, c’est que nous manquons cruellement d’autobienveillance. Nous avons été tellement sensibilisées à l’importance d’offrir de la bienveillance à autrui que nous nous sommes complètement oubliées à cet égard.
Nous ne savons pas comment établir respectueusement nos limites (diantre, on a même du mal à les identifier!), comment dire «non» sans se sentir coupable, comment tolérer d’éventuellement décevoir quelqu’un. Tant et si bien que nous avons oublié l’essentiel: nous plaire à nous-même. Nous célébrer. Nous aimer inconditionnellement.
Et si nous prenions un pas de recul pour nous regarder aller? Et si nous prenions d’abord le temps de nous demander: «De quoi ai-je envie? Quels sont mes besoins?» Et si nous commencions, enfin, à être à l’écoute de nous-même?
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Photo principale : Klaus Vedfelt Getty Images